5 décembre 2008

• Kidnapping

A chaque fois que je vois l'alerte enlèvement, ou à chaque fois que je vois des affichettes d'enfants enlevés, je me retiens pour pas fondre en larmes.
Il y a très longtemps, j'avais treize ou quatorze ans, j'ai été victime d'une tentative d'enlèvement.
Trente ans plus tard, je m'en souviens encore.  Ça s'est passé lors d'un voyage organisé avec un comité d'entreprise, on partait en car pour une quinzaine de jours avec un groupe de cinquante personnes, pour l'Italie. Le premier jour, nous nous sommes arrêtés en Suisse, près du Lac majeur, pour déjeuner. Je revois parfaitement la scène :

Le groupe descend du bus, le car est garé en épis face au lac, sur lequel nagent des cygnes (précision, les cygnes nagent pas sur le bus, mais sur le lac). Je décide de les regarder quelques instants, sans me rendre compte que le groupe remonte une rue perpendiculaire au lac, pour s'enfoncer dans la petite ville lacustre, vers notre restaurant du jour.
Tout à coup, je me retourne, un homme sans visage [impossible de m'en souvenir] me demande si je veux une glace. Il me bredouille que son fils est resté dans un café un peu plus loin sur les berges et comme il ne veut pas de glace, il m'en propose une. Je réfléchis pas, je décline l'invitation... trop tard, le type m'empoigne et commence à m'entraîner vers le supposé-bar. Je regarde en direction du groupe, qui me semble loin, une centaine de mètres, tout le monde avance lentement pour affronter cette côte assez pentue. Le type a beaucoup de force, il me fait mal, il me tient le bras fermement en me disant "viens", et je me rends compte que dans quelques pas, le pignon de l'immeuble me masquera. Je crie. Mon père se retourne et voit la scène. Je commence à me débattre et ayant des bottes à bouts durs, je lui flanque un grand coup de pieds dans les tibias. Mon père pendant ce temps là s'est mis à courir en alertant les autres membres du groupe, qui, pour certains, emboitent le pas, comprenant la scène.
Le type s'enfuit, mon père me demande si tout va bien.
Je lui explique ce qui s'est passé. Les quelques personnes qui nous ont rejoint veulent en avoir le coeur net. On prend la direction de ce supposé-bar, en faisant le tour du pâté de maisons. Pas de bar. Pas de trace du type. Rien.
On part manger et plus tard, nous revoilà dans le car, direction l'Italie. J'entends des chuchotements dans le car "enlèvement, kidnapping", les gens me regardent bizarrement, j'ai été la mascotte du voyage pendant ces quinze jours.
Ce n'est que bien plus tard, par hypnose eriksonienne que cette histoire m'est revenue avec autant de détail, une précision absolue du lieu, de la disposition des maisons, des couleurs, du temps qu'il faisait, comment j'étais habillé.
Mais pas de souvenirs du visage de l'homme sans visage.

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5 commentaires:

Josée (Shandara) a dit…

Wow toute une histoire! J'imagine que ça devait t'avoir marqué pour l'avoir occulté si vite..

Anonyme a dit…

oui... je viens d effacer ce que je viens d écrire ... je t enverrai mon commentaire par mél .

BISOUS

Douce-Exigence a dit…

Tu as du prendre sur toi pour écrire ce texte, sur un blog accessible à qui le veut... C'est souvent dur de se rappeller de ce qui nous a effrayé comme ça.

Personne a dit…

le mettre en mot permet aussi de se débarrasser d'un manteau en trop...

Anonyme a dit…

shandara > En réalité, je me souvenais du fait, mais avec très peu de détails
Lénia > pas de problème, envoie !
Marine > Un blog permet d'écrire ce que l'on veut. Une peur oui, mais levée et digérée aujourd'hui
Icone > Oui, il faut savoir voyager léger